Et si on s’inspirait d’autres philosophies, d’autres concepts pour revigorer l’éducation et nos vies en général? Pour leur donner un autre leadership?
Et si on redonnait du sens à l’école, tant pour les adultes qui prennent soin des enfants que pour le bien de ces derniers?
Issu des langues bantoues parlées en Afrique centrale et australe, et à rapprocher du proverbe « Umuntu ngumuntu ngabantu » (« Je suis ce que je suis parce que vous êtes ce que vous êtes »), le mot Ubuntu pourrait se traduire par « humanité ».
Pour ma part, j’ai découvert ce concept alors que je faisais des recherches sur la philosophie africaine. Ubuntu représente la philosophie de beaucoup de peuples d’Afrique, une philosophie que j’ai pu entrapercevoir lors de mon séjour de près de cinq ans au Cameroun, en terre africaine. C’est là-bas que j’ai ressenti l’Ubuntu dont parle Mandela à travers notamment cette phrase rituelle d’au-revoir, qui chaque fois me touchait au cœur, « on est ensemble ». C’est là aussi que j’ai appris les techniques de coaching et de PNL en compagnie de collègues camerounais qui m’ont appris à me sentir à ma place parmi eux.


Prôner l’Ubuntu, c’est affirmer que l’individu n’est rien sans les interactions qu’il vit avec les autres. Et donc de se considérer comme faisant partie d’un tout, l’humanité.
Que bien qu’un temps d’introspection soit nécessaire pour mieux se connaître, il est essentiel de prendre le temps de construire du lien entre les êtres humains. Qu’un système qui a compris cela est un système résilient, mature et visionnaire.
Dire d’une personne qu’elle a de l’Ubuntu, c’est donc lui faire un sacré compliment !
Comme j’avais envie d’approfondir le concept pour l’école et pour les actrices de l’éducation que j’accompagne, j’ai choisi de lire pendant mes vacances le livre de Mungi Ngomane (petite-fille de Desmond Tutu) « Ubuntu, je suis car tu es », des éditions Harper Collins.
L’auteur nous explique en 14 chapitres, dans un bel ouvrage tout en couleurs, en quoi l’Ubuntu gagnerait à être vécue au quotidien, ici en Europe et partout ailleurs. Dans nos vies quotidiennes et dans nos écoles.
Mungi Ngomane illustre ses propos d’exemples frappants tirés de la vie de Mandela et de Desmond Tutu et d’Afrique du Sud en général, un pays de contrastes tant économiques que géographiques dont je garde un souvenir attendri de ma visite en 2014 🙂 .
Voici les 14 points qui fondent cette philosophie et leurs liens avec la philosophie de la permaculture que j’évoque dans mon cours « Diminuer son stress ». Je développe la pensée de l’auteur et la lie à mon expérience d’enseignante pour imaginer une autre école.
Ce n’est pas toujours facile de se poser toutes ces questions seul.e, c’est pourquoi j’accompagne les personnes qui le souhaitent de façon individuelle pour les soutenir dans leur réflexion.

1. Se voir dans autrui
Se voir dans autrui…c’est-à-dire considérer chaque être humain comme ayant une valeur égale, peu importent ses qualités, son genre, sa couleur de peau ou son diplôme.
Nous sommes interconnectés et égaux. Nous naissons aussi merveilleux les uns que les autres : un nouveau-né qui inspire pour la première fois n’est-il pas juste parfait ? Penser ainsi nous permet de créer plus facilement du lien entre nous. Cela permet aussi de ne pas se sentir complexé.e parce qu’on serait plus grosse, plus vieille ou moins éduquée que quelqu’un d’autre, pas assez quelque chose…. L’autre est mon égal, même si nous ne sommes pas d’accord ou que nous semblons n’avoir rien en commun.
Je veux le respecter et me respecter également. Si je manifeste des qualités associées à la féminité et donc dépréciées dans notre société comme la sensibilité, l’émotivité, le besoin de parler… je respecte cela et le valorise. Si je travaille avec des enfants, je les considère comme de valeur égale à moi et les respecte d’autant. Nos différences d’âge, d’expérience et de connaissances ne justifient pas le mépris mais au contraire ma tendresse et mon respect. Car je vis mes valeurs dans ma vie personnelle ET au travail.
Que peux-tu faire concrètement au quotidien pour te respecter et respecter l’autre?
Je te propose de répéter aussi souvent et fréquemment que nécessaire: « Je suis assez Y/je ne suis pas trop X: je suis quelqu’un de valeur«
2. L’union fait la force
A notre naissance, nous sommes totalement immatures par rapport à d’autres espèces de mammifères qui savent déjà galoper, brouter ou nager. Notre vulnérabilité est si forte que notre survie dépend totalement des autres. L’être humain sait au plus profond de lui que, dès sa naissance, seul, il ne peut rien.
L’ubuntu nous demande de réaliser que notre volonté d’être totalement indépendant est un leurre de la modernité. Tout semble reposer sur nos épaules et cette charge pèse si fort qu’elle engendre angoisse et stress. Je pense notamment à celle que peut ressentir une enseignante ou une directrice d’école qui est submergée par l’administratif, les réunions, ses cours et la gestion des relations avec les collègues et les élèves. Comme si tout ne dépendait que d’elle.
Sans se dédouaner de notre part de responsabilité, il s’agit d’accepter que tout ne dépend pas que de nous. Quel soulagement, non?
La contrepartie, c’est que cela nous demande d’assumer notre vulnérabilité afin de partager nos préoccupations avec les autres. Parler de nos difficultés, de ce que nous avons sur le coeur. Ce n’est pas facile car qui sait comment la personne en face va réagir? Va-t’elle se moquer de nous? Se détourner?C’est un risque à prendre. Seule la garantie d’un cadre bienveillant peut nous permettre d’expérimenter la force qui naît de l’union des personnes.
L’entraide et la solidarité entre les individus permet non seulement de faciliter leur vie mais aussi d’avoir un impact sur des domaines hors d’atteinte pour une personne seule (je pense notamment au mouvement de grève des enseignants en France). Des lois injustes, une société inégalitaire, un danger qu’il faut affronter mondialement comme la survie de la planète sont autant de causes que le nombre permet de défendre.
On peut se mettre ensemble pour défendre de grandes causes mais aussi pour le simple plaisir de se sentir à sa juste place, entouré.e de personnes qui partagent nos valeurs ou nos préoccupations. Se sentir entendu et dire à haute voix ce qui nous préoccupe aident à mieux comprendre la situation à la fois avec la tête et avec le cœur.
Avec qui aimerais-tu créer un groupe d’entraide? Quelle cause te tient-elle à coeur?
3. Se mettre à la place des autres
Cultiver l’empathie, cette capacité de se mettre à la place des autres (« dans leurs chaussures » comme ils disent en anglais), est une clé pour avancer ensemble. Elle permet de dépasser les désaccords de surface pour atteindre le cœur de nos ressemblances, à savoir nos chagrins, nos besoins, nos souffrances communes et notre condition mortelle. Une fois que nous nous voyons comme des êtres vulnérables, sujets aux maladies, à la mort, à la perte en général, il est plus facile de dépasser nos jugements et nos préjugés. Cela vaut aussi pour ceux qui nous auraient blessé sans le vouloir.
Bien souvent, quand une personne nous blesse, il ne s’agit pas d’une affaire personnelle mais plutôt d’une conséquence de son système de pensée ou bien du nôtre. Cela n’efface pas le tort causé, mais le savoir permet d’éviter l’escalade de haine qui engendre davantage de souffrance pour tous.
Sans parler forcément de blessures, le quotidien nous offre son lot de conflits. Je pense notamment à ceux que nous vivons au travail avec nos collègues ou en classe avec les élèves. Et si je me mettais à la place des ados que j’ai en classe?
Dans quelles « chaussures » voudrais-tu te mettre aujourd’hui?
4. Elargir sa perspective
Ce concept est à rapprocher du principe de la permaculture « Aller du général au spécifique ». Il s’agit d’adopter en quelque sorte la posture de l’aigle qui plane au-dessus des montagnes et qui parvient grâce à une acuité visuelle incroyable à voir à plus de 3km un lapin qui gambade dans l’herbe.
Pour nous les êtres humains, l’acuité du cœur associée à une vision d’ensemble (une « big picture ») nous permet de voir l’ensemble des faits et des opinions et non pas seulement ceux qui nous « arrangent » (une tendance très humaine, hélas). Se décentrer est également un moyen efficace pour diminuer son stress (comme j’en parle dans mon cours en ligne « Diminuer son stress »).
Si tu veux manifester cet Ubuntu, c’est la bonne posture à prendre et cela te demande de croire en la souplesse de notre esprit humain – et de la cultiver chez nos enfants.
Comment ? Ferme les yeux et imagine que tu regardes la situation sur un écran. Si cet écran est gigantesque, plein de couleurs et de bruit et plutôt bouleversant, il te suffit d’en diminuer la taille et le son et d’adoucir les couleurs. Tu peux même carrément couper le son et transformer ce que tu vois en noir et blanc. Et maintenant que tu regardes ta situation de loin, tu la vois différemment. C’est un exercice que je fais souvent avec mes clientes qui sont stressées par telle ou telle situation. Je l’ai moi-même beaucoup pratiqué depuis que je suis petite.
La situation qui te fait souffrir ou qui te pose problème, comment la considéreras-tu dans 5 ans ? Et dans 20 ans ?
5. Faire preuve de dignité et respect envers soi et les autres
Prendre soin des autres et les respecter en toute dignité commence par le fait de prendre soin de soi. Il s’agit pour moi d’un concept-clé que je veux transmettre aux personnes que j’accompagne.
On le retrouve dans les éthiques de la permaculture qui, au contraire de l’agriculture traditionnelle, cherche à prendre soin des êtres vivants.
Il ne s’agit pas d’être égoïste ou égocentrique mais plutôt de comprendre que prendre soin de soi est la condition pour pouvoir prendre soin des autres sur le long terme. Comment pourrais-tu échanger de l’énergie, de l’attention ou du soin si tu es complètement assoiffée, énergétiquement parlant ? Se dévouer jusqu’à s’oublier est une tendance que nous avons souvent, nous les femmes, et ce n’est pas quelque chose de totalement inné.
Notre société patriarcale a mis sur les épaules des femmes les travaux liés au soin (des hommes, des enfants). Le christianisme dévoyé a aussi accentué cet état de fait que le capitalisme a terminé de solidifier. Bref, il est mal vu de prendre soin de soi, d’autant plus si on est une femme. Je t’enjoins à changer cela en respectant tes besoins essentiels de base. Si tes besoins sont respectés, cela t’apportera un doux sentiment de dignité qui rend fier tout être humain.
L’auteur rappelle également que notre société occidentale a instillé dans nos esprits l’idée qu’il faut se débrouiller seul.e pour réussir, à la manière des « self-made men » américains. Or, cette idée est dangereuse car elle met sur les épaules de l’individu l’entière responsabilité de ses échecs, sans prendre en compte son contexte. Et elle empêche de se sentir satisfait d’avoir accompli quelque chose si on y a été aidé. La philosophie de l’Ubuntu nous demande d’aller à rebours de cette idée pernicieuse en nous encourageant à demander de l’aide. Tu ne dérangeras pas l’autre, au contraire tu lui permettras de se sentir utile et important. Le sentiment de communauté passe aussi par le réseau de l’entraide. Et si tu as peur d’être rejetée, dis-toi que c’est ta demande qui le sera et non toi; et qu’une autre personne sera peut-être ravie de t’aider. Enfin, si cela te semble impossible de demander de l’aide alors même que tu en aurais besoin, dis-toi que tu n’obtiendras aucune médaille pour avoir fait seule en galérant ce que tu aurais pu accomplir avec l’aide d’un autre dans la joie !
Enfin, quand nous sommes dans un cercle de parole, demander de l’aide sous forme d’une écoute bienveillante et attentive fait partager la responsabilité de la réflexion cœur-esprit et non de l’action concrète. Il s’agit d’une différence importante à souligner pour ceux et celles qui craindraient de perdre leur autonomie. Car, au final, ce sera à toi d’agir dans ta propre vie selon tes propres valeurs.
Les connais-tu bien?
6. Croire en la bonté de chacun
Ce chapitre complète le précédent avec ce principe de base de l’Ubuntu et de mon travail de coach : il s’agit de croire en la bonté de chacun.
C’est une décision difficile à prendre car elle nous demande de faire abstraction des petites et grandes nuisances quotidiennes de nos vies. Le collègue qui ne nous aide pas, l’élève qui nous manque de respect, le voisin qui laisse son chien aboyer sans parler de tout ce que nous lisons dans les journaux. Les guerres, les viols, les crimes en tout genre. Tout cela existe mais nous pouvons décider de regarder les actions positives autour de nous, qui existent aussi. Quelqu’un qui cède sa place à un ancien, un élève sympa, un mouvement des jeunes pour le climat ou tout autre chose. Notre regard doit changer et avec lui notre cœur et notre esprit.
Pourquoi prendre cette décision?
Parce qu’il est un fait que nous voyons le monde non tel qu’il est objectivement mais avec nos propres filtres issus de notre éducation, de notre milieu, de notre temps. Nous pouvons décider de changer ces filtres, ces lunettes, pour en chausser d’autres. Nos croyances influent sur ce que nous voyons et cela crée un cercle vicieux: si j’ai peur d’être cambriolé, je vais me focaliser sur les faits divers qui parlent de vols. Il ne s’agit pas d’arrêter de fermer sa porte à clé mais de diriger son regard et ses actions vers autre chose: du bénévolat dans une association, un métier davantage en phase avec ses valeurs, un bonjour cordial aux voisins.
L’auteur suggère de tenter l’exercice du sourire afin de constater l’évidence : le sourire apporte le sourire, la bonté attire la bonté et ce qui est de plus beau en chacun de nous peut être révélé grâce au miroir que nous fournissons par notre sourire et notre volonté d’y croire. Essaie, ça en vaut la peine !
Ce qui fonctionne bien pour aider à voir la bonté en chacun de nous, c’est de se dire que nous sommes tous l’enfant de quelqu’un; que nous avons tous été un jour un petit enfant vulnérable. Cet enfant existe toujours dans notre coeur et dans notre inconscient. Il est souvent blessé et cette blessure le conduit à commettre des actions destructrices pour lui et pour les autres. Il ne s’agit pas ici d’excuser, mais bien de comprendre et de changer son regard.
Ce présupposé est important dans le cadre de groupes de parole lorsque ce qui est dit est confidentiel. Cela nécessite un contrat moral entre les participants à exprimer au début de chaque session pour en souligner l’importance. Croire en la bonté de chacun et s’en assurer pragmatiquement 😉
A qui vas-tu sourire sans rien demander en retour?
7. Préférer l’espoir à l’optimisme
Le point suivant permet d’expliquer davantage le précédent en faisant la distinction entre espoir et optimisme. On reproche souvent aux coachs de prêcher un optimisme béat à la manière des bisounours, de prôner la bienveillance comme un curé le ferait ou d’encourager des croyances type méthode Coué. Et il est vrai que l’optimisme, la bienveillance et la méthode Coué sont totalement inefficaces s’ils sont fondés sur un désir personnel coupé de tout contexte. La clé est ici d’y ajouter un réel pragmatisme terrien (dont j’ai hérité grâce à mes racines ardennaises 🙂 ) qui permet de prendre tout le système en compte afin de fonder cet optimisme sur des bases solides. Ces bases solides me donnent la confiance et donc l’espoir.
Quand je décide de voir la bonté en chacun de nous, je ne suis pas optimiste. J’ai analysé le contexte dans lequel je navigue (par exemple, une école élitiste et inégalitaire pour les élèves, qui n’a pas évolué positivement et qui n’a pas valorisé ses enseignants) et déterminé les leviers sur lesquels je peux agir – et ceux qui ne dépendent pas de moi. J’ai l’espoir qu’avec suffisamment d’entraide et de solidarité, les choses peuvent changer.
Cet espoir est une sorte de boussole pour avancer dans la bonne direction. Et même quand les choses semblent s’être embourbées, je garde confiance dans mon chemin.
Et toi, qu’espères-tu pour demain?
8. Chercher à créer du lien
Ce chapitre m’a vraiment fait penser à la permaculture car c’est la base de cette philosophie du vivant : créer du lien entre les éléments afin de renforcer la résilience du système. Nous faisons partie de l’éco-système des êtres vivants et, à ce titre, c’est de nos liens que se crée un tissu qui peut nous porter vers davantage d’Ubuntu.
L’auteur nous invite à juste titre à passer davantage de temps dehors, dans la nature afin de ressentir ces liens qui nous unissent à la planète.
Quant à moi, j’encourage les personnes à créer des communautés de partage : partage d’expérience ou partage d’aide notamment. Les cercles aussi sont très importants, surtout pour nous les femmes qui devons restaurer les liens qui nous unissent. La compétition instaurée par le patriarcat entre nous doit cesser. Les critiques acerbes sur le physique de l’une, la manière d’éduquer ses enfants de l’autre ou encore sa façon d’enseigner ne font que renforcer la domination masculine dénoncée depuis longtemps et plus récemment avec le hashtag metoo. A notre niveau, nous pouvons décider de créer un cercle de parole afin de nous soutenir dans notre tâche de mère, d’enseignante ou dans les passages délicats de nos vies. La parole des femmes ayant été longtemps dépréciée et méjugée (on dit souvent que les commérages sont féminins) il est temps de la revaloriser et de montrer la puissance et la force qui naissent quand la parole qui vient du cœur est entendue et accueillie par les autres. Animer un cercle est à la portée de toute femme qui accepte d’être un véritable contenant pour les émotions, les vécus et la parole des participantes.
J’invite également les hommes à expérimenter le pouvoir du cercle s’ils souhaitent instaurer davantage d’équilibre dans leur vie, s’ils veulent exprimer davantage leur part féminine. J’anime de tels cercles dans les écoles pour toutes les âmes de bonne volonté qui ont envie d’apporter davantage d’Ubuntu dans leur établissement et leurs pratiques. Plus nous nous sentons liés, plus nous sommes sereins.
Et toi, comment pourrais-tu créer davantage de lien autour de toi?
9. Pourquoi les petites choses font une grande différence
Les petites choses, comme les solutions petites en permaculture, sont toujours les prémices des grands changements. A ce titre, elles sont essentielles à mettre en œuvre au quotidien car c’est leur addition qui créera le changement. Nous avons parfois l’impression que nos actions ne servent à rien. Un sourire et une main tendue peuvent-elles faire la différence ? Rosa Parks, en refusant de céder sa place à un homme blanc aurait-elle pu deviner que son geste allait être un déclencheur de la fin des lois ségrégationnistes des Etats-Unis ? L’auteur nous enjoint à nous concentrer sur ces petites choses du quotidien qui ont autant de valeur que les grandes. La petite main d’un enfant dans la nôtre alors qu’on marche, un café partagé avec une amie sont autant de petites choses qui nous rendent heureux. Quant aux heures de nos vies, elles semblent bien courtes en journée : ne les perdons pas. Offrons-les aux autres : c’est un cadeau précieux de celui ou celle qui manifeste de l’Ubuntu.
Il ne s’agit pas de s’oublier mais d’accorder aux autres autant de valeur qu’à soi et de les traiter aussi bien. Ce conseil semble aller à contre-courant de notre société et du besoin que nous avons de réfléchir attentivement à nos valeurs mais elle explique que le second temps de l’introspection est l’attention juste portée aux autres que soi. Je la rejoins totalement.
Tu as peut-être de grandes idées et de grands espoirs pour ton projet. Quelle est la plus petite chose que tu peux faire aujourd’hui et qui en constituera le premier pas?
10. Trouver l’humour dans notre humanité
As-tu déjà vu et entendu le rire d’un bébé? Te rappelles-tu comme tout est prétexte à rire quand on est enfant et ado? Nous rions moins à mesure que nous vieillissons. Pourtant, il est prouvé que le rire est non seulement bon pour la santé individuelle mais aussi qu’il renforce les liens entre deux personnes. Le rire permet de détendre les corps, les esprits et l’atmosphère.
Je me rappelle combien le rire m’a permis d’entrer en lien avec les personnes, tant avec les vendeuses de bananes des marchés du Cameroun qu’avec mes élèves démotivés en classe. Le rire rapproche les coeurs car il nous rappelle que nous sommes tous « dans le même bateau », tous humains. Nous avons tous été des bébés rieurs.
Nous avons la chance d’être suffisamment conscients en tant qu’adultes que pour pouvoir trouver quelque chose de drôle dans la plupart des situations. L’auteur nous invite à trouver l’humour dans notre humanité, à ne pas prendre les choses trop au sérieux. Nous sommes tous mortels et voudrions-nous passer le dernier jour de notre vie à nous prendre la tête sur des broutilles ?
Il est parfois mal vu pour un prof de rire avec ses élèves ou pour une directrice de plaisanter avec son équipe. On a peur de perdre en sérieux et donc en légitimité. Je te propose de tester cette nouvelle croyance positive au travail: « je ris avec les autres pour créer du lien entre nous ». Et observe ce qui se passe (je te promets que ton autorité ne va pas décliner mais au contraire tu gagneras en leadership).
11. Accepter la réalité aussi douloureuse soit-elle
Incarner les qualités de l’Ubuntu ne signifie pas faire l’autruche, comme l’avait expliqué le chapitre sur l’espoir, mais bien voir la réalité en face et l’accepter. C’est loin d’être une posture facile car là aussi il faut beaucoup de courage pour affronter ce qui ne va pas. Les risques nous effraient : conséquences inattendues, tensions, conflits internes et externes etc. Mais le jeu en vaut la chandelle car c’est en acceptant l’entière réalité que nous pouvons discerner ce qui dépend de nous, de notre responsabilité, de ce qui ne l’est pas. Et ainsi espérer modifier ce qui ne fonctionne pas.
Nous aurons davantage de courage en demandant de l’aide autour de nous pour accepter une réalité douloureuse.
Quelle est ta réalité aujourd’hui? Qu’est-ce qui te fait souffrir? Dans quel système dysfonctionnel te trouves-tu? Prends le temps de l’analyser. Détermine quelle est ta zone d’action et surtout qui d’autre que toi pourrait t’aider à atteindre ton objectif.
12. Célébrer notre diversité
En permaculture, la diversité est valorisée et recherchée. Les écosystèmes les plus résilients sont ceux qui sont composés de multiples éléments différents liés entre eux de façon complexe. Leurs éléments sont rustiques, c’est-à-dire sauvages et résistants. Cette complexité n’est pas effrayante mais au contraire recherchée.
Il en va de même dans la philosophie de l’Ubuntu. Elle part du principe que la diversité des êtres humains (diversité des opinions, des genres, des culture etc) nous permet de créer quelque chose de Bien, que ce soit une idée ou une maison. Si nous étions tous les mêmes, nous ne parviendrions à rien. La condition sine qua none pour valoriser cette diversité, est d’y associer la notion d’égalité : nous sommes tous différents ET tous égaux.
Dans nos écoles, cela se traduit par la célébration de la diversité des élèves en termes d’origine socio-économique, de mode d’apprentissage, de capacités physiques et même de caractère. Quel dynamisme chez nos élèves de lycées professionnels! Quelle sensibilité chez les enfants introvertis! Quelle banque d’idées créatives chez ceux qui ont un TDAH! Quel courage chez les enfants porteurs de handicaps!
Chez les adultes, il en va de même. Le collègue « rabat-joie » a autant à nous apporter que le boute-en-train. Le nouvel arrivé peut apporter un regard rafraîchissant pour ses collègues plus anciens.
Cette diversité n’est donc pas un poids à supporter, une simple source de tensions mais une force qui garantit la résilience du groupe à travers la pleine acceptation du conflit. Célébrons cette diversité !
De quelle diversité autour de toi souhaites-tu aujourd’hui te réjouir, même si elle n’est pas toujours facile à vivre?
13. Le pouvoir du pardon
La vengeance n’apporte aucune guérison, on le sait. Mais il est tellement difficile de pardonner à quelqu’un qui nous a fait du mal ! C’est comme si, en lui pardonnant, on craignait d’effacer ce qui s’est passé, de l’oublier. Comme si on refusait de quitter notre posture de victime (que nous avons en effet été) de peur que le mal ne soit plus reconnu ou qu’il n’existe plus.
Nous confondons pardon et oubli.
Pardonner ne signifie pas oublier, ni psychologiquement ni judiciairement s’il s’agit d’un crime. Il faut qu’il y ait une réparation morale, qu’elle soit symbolique sous forme de mots ou matérielle. C’est le principe du don et du contre-don en quelque sorte, ou simplement le principe de l’équilibre si important pour notre psychique. Les peines d’emprisonnement, les exclusions sont une forme de réparation. Si la personne en question n’est pas capable de faire cette réparation (parce qu’elle ne se rend pas compte de ce qu’elle a fait par exemple ou parce que son crime n’est pas entièrement réparable matériellement), c’est la société toute entière qui peut prendre en charge cette réparation en écoutant avec respect la parole de la victime.
Dans les cas de harcèlement à l’école, les adolescents que j’ai suivis m’ont tous confié que c’était la prise en compte respectueuse de leur parole par les adultes qui les avait le plus aidés. Et, à contrario, ceux qui restaient traumatisés par le harcèlement dont ils avaient été victimes, soulignaient le manque d’écoute et de réponse concrète des adultes dans cette situation (qui ne croyaient pas les victimes ou ne réagissaient pas par peur de représailles). Pour les adultes, le principe est le même : la réponse ou la non-réponse de nos proches, de nos collègues, de notre hiérarchie à nos problèmes est déterminante dans la suite de notre trauma.
Quand la société ne joue pas son rôle, il est possible de pallier à ce manque de réparation à condition de faire un travail introspectif profond afin d’aider notre inconscient à réparer la blessure (l’hypnose, les constellations, la respiration sont autant de pratiques possibles).
Pardonner n’est pas facile. Il s’agit de quitter une situation connue pour aller vers l’inconnu. C’est donc un mouvement courageux qui vient du cœur. C’est un cadeau à se faire à soi en premier lieu : se pardonner de certains choix malheureux et pardonner l’autre permet d’entamer un travail de guérison de nos blessures et de se sentir plus serein.
Que voudrais-tu pardonner pour avancer plus légèrement?
14. Apprendre à écouter permet de mieux entendre
L’auteur termine son livre sur quelque chose qui me paraît être le plus important pour qui voudra vivre l’Ubuntu: apprendre à écouter vraiment. C’est difficile de se rendre compte qu’on ne sait pas écouter jusqu’à ce qu’on apprenne exactement comment le faire. L’apprentissage en soi n’est pas complexe mais il demande de passer d’une écoute passive à une écoute active (celle que je pratique en coaching) et donc de se décentrer de soi pour aller vers l’autre.
On a en effet plutôt l’habitude d’écouter impatiemment l’autre pour lui exposer nos idées et nos arguments quand c’est « notre tour ». Mais, ce faisant, on n’entend pas ce qu’il dit, ses besoins et l’émotion qu’il exprime.
Et on assiste bien souvent à un dialogue de sourds où personne ne se comprend ou, pire, dans lequel les personnes répètent exactement ce que l’autre a dit en affirmant ne pas être d’accord….(je l’ai souvent observé en réunion).
Si tu as déjà expérimenté le fait d’être vraiment et totalement écoutée, tu sais à quel point cela peut être à la fois bouleversant. Ce n’est pas quelque chose dont on a l’habitude premièrement, cela « sacralise » d’une certaine façon les paroles que nous prononçons et enfin cela peut d’une certaine façon apaiser notre coeur.
Des pratiques de communication efficaces telles que la CNV (communication non violente) ou la PNL (programmation neuro-linguistique) sont elles aussi convaincues qu’avant de parler il faut écouter.
As-tu envie d’apprendre à écouter? C’est un des présupposés d’un leadership au féminin et c’est la première étape de mon programme intitulé « Ubuntu, je suis car tu es » à destination des actrices de l’éducation qui veulent développer leur leadership. Je rends ici hommage à ma mentor Claudélen Méallet de melodius consulting qui m’a inspiré ce programme qu’elle décline en Afrique, au Cameroun, à destination des étudiants en management de l’UCAC et qui m’a permis de l’assister sur ce projet.
En savoir plus sur mon parcours ICI.